We Were Eight Years in Power: An American Tragedy (Ta-Nehisi Coates)
J'ai cru à tort que ces huit ans désignaient la présidence de Barack Obama. Il s'agit en fait d'une citation d'un parlementaire noir de Caroline du Sud se lamentant de la courte durée de la Reconstruction : We were eight years in power. We had built schoolhouses, established charitable institutions, built and maintained the penitentiary system, provided for the education of the deaf and dumb . . . rebuilt the bridges and reestablished the ferries. In short, we had reconstructed the state and placed it on the road to prosperity. Cette courte période qui a pris fin lorsque les anciens Confédérés ont décidé de rendre le Sud à l'homme blanc et de révoquer tout ce qui avait été réalisé (ça me rappelle quelqu'un). On connaît la suite.
Ce livre rassemble huit articles publiés dans The Atlantic au cours de la période entre la candidature de Barack Obama à l'investiture démocrate et la fin de son deuxième mandat présidentiel. Ta-Nehisi nous explique pourquoi il était le candidat parfait : espoir de changement pour les Noirs et autres minorités, et Noir acceptable et non menaçant pour les Blancs.
Les articles sont disponibles sur le site de The Atlantic : This Is How We Lost to the White Man (article sur Bill Cosby avant les accusations), American Girl (sur Michelle Obama), Why Do So Few Blacks Study the Civil War? (sur ce révisionnisme systématique quand la Guerre de Sécession est évoquée), The Legacy of Malcolm X (où il établit un parallèle entre Malcolm X et Barack Obama), Fear of a Black President (sur la façon dont Barack Obama a toujours évité de parler de race et du racisme, et les conséquences les rares fois où il s'y est risqué), The Case for Reparations (sur les compensations dues aux Noirs pour l'esclavage et la ségrégation), The Black Family in the Age of Mass Incarceration (malheureusement !), My President Was Black (où il dresse un bilan de la présidence de Barack Obama). Chaque article est précédé de remarques : Notes from the First Year, Notes from the Second Year, etc. dans lesquelles il décrit sa situation au moment de la rédaction, le contexte et le motif de l'article, les articles qu'il préfère, ceux qu'il estime ratés, ceux qui ne vont pas assez loin. Et en épilogue, il ajoute l'article The First White President où il explique que 45 a été élu uniquement parce qu'il est Blanc et que son seul objectif est d'effacer toute trace de la présidence d'un Noir qu'il considère comme une insulte personnelle. Il met également à mal la théorie selon laquelle ce sont les laissés pour compte (les pauvres Blancs de la classe ouvrière) qui ont porté 45 au pouvoir. Enfin, il laisse parler les chiffres qui sont sans appel en fait.
Évidemment, ce n’est pas l’idéal de lire tous ces articles à la suite puisque Ta-Nehisi Coates développe parfois les mêmes idées de l’un à l’autre. Cela peut donner l’impression qu’il se répète même si les arguments sont valides à chaque fois. J'ai préféré les derniers articles du recueil. Je retiendrai particulièrement l'affaire Shirley Sherrod (l’une des pires hontes de la présidence de mon président) et le fait que Barack Obama était sûr que 45 ne gagnerait pas l’élection. Il pensait (espérait ?) peut-être que l’Amérique était réellement post-raciale.
Je recommande absolument. En plus d’être très instructif, il permet de voir l’évolution de Ta-Nehisi Coates, sa façon de se former et de s’informer au fil des années. J’aime de plus en plus ce qu’il écrit. Et je lui pardonne son commentaire sur l’éducation en France qui est, il est vrai, partiellement justifié.
Les articles Ta-Nehisi Coates dans The Atlantic :
https://www.theatlantic.com/author/ta-nehisi-coates/
Je remercie Ta-Nehisi Coates, Random House Publishing Group et NetGalley pour cet exemplaire en avant-première.